Labels :  Bleak Recordings // Division Records // Dullest Records // GPS Prod. // Grains of Sand Records // Halo of Flies // Lost Pilgrims Records // Longlegslongarms // Wolves And Vibrancy Records // Unquiet Records.

Style : Sludge/Doom/Postcore/Black-Metal

11 années d’activité (à la louche..), une flopée de sorties, des concerts homériques aux quatre coins de l’Europe, une réputation qui n’est plus à faire, en 2016 Rorcal n’a strictement rien à prouver. Tant mieux c’est parfois dans ces moments là que les choses deviennent les plus intéressantes artistiquement parlant. Car après s’être faits un nom avec un EP, un split avec leurs compatriotes de Kehlvin (‘Ascension’) et un album inaugural (‘Myrra, Mordvynn, Marayaa’ sorti sur un label qui n’avait de label que le nom et est heureusement aujourd’hui disparu), les Suisses avaient mis la barre très haut en 2010 avec l’immense ‘Heliogabalus’ et ses quelques 74 minutes de musique couchées sur… un seul morceau, soit un véritable modèle et petit chef d’œuvre du genre au rayon doom/black des familles.

Pas mal de sorties éparpillées un peu partout plus tard, le tout à un rythme très soutenu (avec notamment quelques splits dont un avec les excellents Process Of Guilt), le groupe avait entre-temps livré sa propre relecture de la fin du monde avec le brutal ‘Vilagvege’ (2013), suivi d’un album live et d’un EP pour célébrer leur dixième anniversaire (‘La Femme sans tête’) avant de commettre ce ‘CREON’ forcément attendu au tournant et sorti par le biais de toute une flopée de labels dont l’incontournable Division Records (ASIDEFROMADAY,, Impure Wilhelmina, Shovel, Unfold…). Autant de part son concept d’ailleurs – évoquant la mythologie du tyran sanguinaire qui donne son nom à l’album et fut à plusieurs reprises aux commandes de la ville de Thèbes que de sa réalisation formelle, comme toujours irréprochable artistiquement parlant.

Production particulièrement soignée – elle est signée Stéphane Kroug (Mumakil, Wardhill…) alors que le mix a été confié à Daniel Bergstrand (Meshuggah., etc…) – afin de laisser la part belle à ce magma post–core/black-metal qui s’empare de sa proie dès les premiers instants, ‘CREON’ impressionne d’entrée de jeu. Une ambiance ‘d’après’ fin des temps paradoxalement aussi apaisante au départ, qu’écrasante de puissance et d’intensité brute quelques instants plus tard, les helvètes mettent du cœur (et leurs trippes) à l’ouvrage. Il faut dire que l’on est alors sous le poids d’une véritable déferlante de haine, d’une lame de fond qui vient happer l’auditoire et l’emmener dans les tréfonds du hard. Sans concession et avec un sens particulièrement aiguisé de la narration sonore, à la fois brutale, épique, excessive mais maîtrisée sous une chape de plomb.

Une cohérence parfaite avec cette histoire que raconte l’album au riffing glaçant et à la mélancolie déchirée, entre tragédie grecque et violence assourdissante., le groupe maîtrise comme toujours son sujet, sait ce qu’il veut faire passer comme émotions et comme procéder pour les exacerber. Lourd (c’est un euphémisme) et dévastateur, Rorcal est sur ce ‘CREON’ l’archétype du groupe qui sait toujours raconter des choses, poursuivre son cheminement musical sans avoir forcément besoin de se réinventer ou de briser ses formats pour tout reconstruire derrière, ce, alors qu’il y a tout de même une constante, la férocité d’un chant littéralement habité par le malin, appuyant un peu plus le propos (post)-apocalyptique de cet album définitivement dantesque.

Quelque part à la croisée des chemins entre Celeste, Isis et Lithurgy, le Rorcal cru 2016 est un disque ultra-massif qui blaste toujours comme un damné mais réussi aussi à tirailler les entrailles de son auditoire, autant par son urgence sacrificielle que de part le raffinement jusque-boutiste qui s’en dégage. En même temps, on était prévenu avec ces cinq-là : ils n’en sont pas à leur premier coup, certainement pas au dernier.

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A propos de l'auteur

Big boss/grand-mamamushi, God(e) ceinture et mite en pull-over. (je fais aussi le café et les photocopies)

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